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Actualité de la recherche scientifique mondiale 446 sur les glioblastomes



Estimation non envahissante, in vivo, de la mutation IDH1 dans les gliomes

Actualité n° 446 du 11/09/2013

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Article original  10 septembre 2013 volume 10;4:2429. doi: 10.1038/ncomms3429

Estimation non envahissante, in vivo, de la mutation IDH1 dans les gliomes

Auteurs : Chaumeil MM, Larson PE, Yoshihara HA, Danforth OM, Vigneron DB, Nelson SJ, Pieper RO, Phillips JJ, Ronen SM,. Département de Radiologie et Prise d'images Biomédicale, Université de Californie San Francisco, 1700 4e Rue, San Francisco, Californie 94158, USA,

Résumé
Des mutations du gène de l'isocitrate déhydrogénase 1 (IDH1) sont fréquentes dans les gliomes de bas grade et les glioblastomes secondaires. Ces mutations conduisent à une accumulation intracellulaire de l'oncométabolite 2-hydroxyglutarate, ce qui représente un événement pathogène précoce et ce peut être une cible thérapeutique. Ici nous montrons, dans cette étude la preuve du concept que [1-(13)C] α-kétoglutarate peut servir comme agent de prise d'images métaboliques en spectrométrie par résonance magnétique, méthode non-envahissante, en temps réel, in vivo pour mesurer l'activité d'IDH1 muté, et nous informer sur son statut. Utiliser le traceur isotopique [1-(13)C] α-kétoglutarate en spectrométrie par résonance magnétique MRS, et en combinaison avec la dissolution de la polarisation nucléaire dynamique, le destin métabolique d'hyperpolarisation de [1-(13)C] α-kétoglutarate peut être étudié dans les cellules de glioblastome isogénique qui diffèrent seulement dans leur statut IDH1. Dans les lysates et les tumeurs qui expriment IDH1 de type sauvage, l'hyperpolarisation seulement de [1-(13)C] α-ketoglutarate peut être détecté. Par contraste, dans les cellules avec IDH1 muté, l'hyperpolarisation de [1-(13)C] 2-hydroxyglutarate et donc la présence de la mutation IDH1 a pu être observée dans les lysates cellulaire et in vivo dans les tumeurs orthotopiques.

Pubmed : 24019001


Vocabulaire
Spectrométrie par résonance magnétique RMN ou MRS

La spectroscopie RMN permet l'étude de la présence et de la concentration de certains métabolites, petites molécules issues du métabolisme. Son application est encore rare. La spectroscopie RMN demande des IRM de haut-champ (1,5 Tesla minimum et 3 Tesla pour obtenir des pics bien différenciés) et des formations spécifiques pour les radiologues. Cependant la technique semble très prometteuse en oncologie, par exemple, car elle il permet de faire la différence entre une récidive locale et une nécrose pot-radiothérapique dans un stade précoce avec une précision que, seule, une biopsie invasive, peut aujourd'hui faire.
α-cétoglutarate
L’acide α-cétoglutarique, également appelé acide 2-oxoglutarique est une cétone dérivée de l'acide glutarique, l'autre étant l'acide β-glutarique, bien moins courant. Sa base conjuguée est l'α-cétoglutarate, qui est un métabolite important. Il est produit par la décarboxylation oxydative de l'isocitrate par l’isocitrate déshydrogénase. Il joue un rôle physiologique comme intermédiaire entre deux neurotransmetteurs antagonistes, le glutamate excitant et l'acide gamma-aminobutyrique (GABA) inhibant.
Cétone
Composé organique contenant le groupement carboxyle -CO-
2-HG hydroxygluratate
La mutation IDH1 a pour but de convertir le  α-kétoglutarate en 2-hydroxyglutarate (2-HG). Les gliomes avec la mutation IDH1 ont tous de hauts niveaux de 2-HG.
[1-(13)C]
les atomes, quels qu’ils soient, sont présents dans le milieu sous différentes formes se distinguant chacune par un nombre spécifique de neutrons ; chaque forme s’appelle isotope. Par
exemple les Carbone 13 ou 14 (13C ou 14C), isotopes du carbone, sont bien connus.
La résonance magnétique RMN du carbone 13 (13C) ou parfois simplement appelée RMN du carbone est l'application de la résonance magnétique nucléaire (RMN) du carbone. Il est analogue à la RMN du proton (RMN 1H) et permet l'identification des atomes de carbone dans une molécule organique comme la RMN du proton identifie des atomes d'hydrogène. Ainsi, la RMN du 13C est un outil important dans la détermination de la structure chimique en chimie organique. Seul l'isotope 13C du carbone de spin 1/2, dont l'abondance naturelle n'est que de 1,1 %, n'est détectable par RMN, parce que l'isotope du carbone principal, 12C, a un spin nul.
Polarisation, dépolarisation, hyperpolarisation.
A l'état normal la surface externe d'une cellule est chargée positivement alors que la surface interne est chargée négativement. Les neurones, le myocarde, les muscles se polarisent et se dépolarisent naturellement. Les cellules gliales sont perméables au potassium. Si le potassium se concentre en ions K+, la surface externe se polarise + et va attirer les ions -, alors que la surface interne - va attirer les + pour les faire sortir.


La même étude avait déjà été faite par l'équipe de La Timone à Marseille en 2012
Une méthode non invasive pour le diagnostic et le pronostic du gliome
Deux études décrivent une approche non invasive pour détecter un biomarqueur (2-HG) des mutations IDH dans le gliome, qui sont associées a un meilleur pronostic. Cette approche de spectrométrie par résonance Magnétique (SRM) pourrait être précieuse pour le diagnostic, le pronostic et la stratification des tumeurs cérébrales, ainsi que pour la surveillance du traitement chez les patients atteints de gliome. Les gliomes, tumeurs cérébrales regroupant les astrocytomes, les oligodendrogliomes et les oligoastrocytomes mixtes, ont un pronostic très  variable qui dépend en partie de leur grade de malignité (de 1 à 4) et des caractéristiques histologiques. Toutefois, des tumeurs de même diagnostic peuvent avoir une évolution très variable, ce qui souligne le besoin d'identifier d'autres marqueurs pronostiques afin de mieux guider la prise en charge thérapeutique des gliomes. Une avancée a été faite en 2008 lorsque des études génomiques ont montré que des mutations hétérozygotes des gènes IDH1 et 2 (Isocitrate déshydrogénase I et 2), trouvées dans86% des gliomes de grade II et III et des glioblastomes secondaires sont associées à un pronostic plus favorable.
Ces gènes IDH permettent la synthèse d'une enzyme importante, l'isocitrate déshydrogénase, qui joue un rôle essentiel dans la respiration cellulaire, en  favorisant la décarboxylation oxydative de l’isocitrate pour produire l'alpha-cétoglutarate (alpha-KG). Les mutations IDH entraînent la perte de cette fonction, mais elles confèrent aussi un gain de fonction enzymatique favorisant la réduction de l’alpha-KG pour produire le 2-hydroxyglutarate (2-HG), un métabolite potentiellementoncogène, impliqué dans le développement du gliome.
Deux études décrivent maintenant une approche non invasive pour détecter la présence desmutations IDH dans le gliome, par le biais du 2-HG. 
Pour la détection du 2-HG, Elkheled et coll. (université de San Francisco) ont utilisé une nouvelle  méthode de spectrométrie par résonance  magnétique (SRM) pour détecter et quantifier les taux de 2-HG ex vivo dans 104 échantillons de gliomes de grade II récurrent provenant de 52 patients (40 avec la mutation IDH et 12 sans mutation IDH). Ils montrent une forte concordance entre la présence de 2-HG et la mutation IDH dans les échantillons. De plus, la production de 2-HG est trouvée avec n'importe quel type de mutations IDH1 et IDH2 et constitue donc un  biomarqueur adéquat des mutations IDH de la tumeur.
Andronessi et coll. (Harvard Médical School, Boston) confirment ces résultats in vivo, en utilisant une méthode similaire de spectrométrie par résonance magnétique, rapportent la détection in vivo du 2-HG chez 2 patients ayant un gliome avec mutation IDH1. Ils montrent ainsi que la présence des mutations IDH peut être évaluée de façon non invasive par l'imagerie spectroscopie.
Cette découverte est Importante puisqu’il n'existe pas d'augmentation du 2-HG dans le sang, ni dans le LCR ou l'urine des patients atteints de gliome.
« Cette approche pourrait avoir des implications précieuses pour le diagnostic, le pronostic et la stratification des tumeurs cérébrales ainsi que pour la surveillance du traitement chez les patients atteints de gliome » notent dans un commentaire les Drs Philippe Metellus et Dominique Figarella-Branger (Hôpital de la Timone, et INSERM UMR911, Marseille).
Andronessi et coll. Elkaled et coll.
Metellus et Coll. Science translational Medecine 11 janvier 2012


Réf. Le quotidien du Médecin n° 9068 du 18 janvier 2012

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